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Night Lights

Les fournisseurs de demain: 
qui sont-ils?

Ecrit par Amélie Janin & Alexis Gléron, octobre 2024

Ecrit par Amélie Janin & a

Dans un article de 2022 sur les fournisseurs (ici), on évoquait les futurs défis des fournisseurs 3.0 ainsi que les incertitudes pesant sur leur avenir : oligopole, développement du nombre de fournisseurs et les défis potentiels auxquels ils pourraient être confrontés pour accéder aux marchés.

À travers cet article, il nous semble intéressant de mettre à jour ce dernier et de parler davantage des nouveaux fournisseurs alternatifs en s'appuyant sur les données actuelles. En effet, les nouvelles tendances du marché de l’électricité redistribuent les cartes et permettent à de nouveaux acteurs économiques d'entrer sur le marché de l’électricité.

Un marché de détail qui se remet doucement de la crise

En septembre 2024, la CRE a publié son rapport sur les marchés de détail de l’électricité et du gaz naturel. On retient avant tout que le marché de l’électricité se remet de la crise énergétique. Par exemple, le nombre d’offres disponibles a atteint un niveau similaire à celui précédant la crise. Entre le 30 mars 2024 et le 30 juin 2024, 169 000 sites résidentiels sont passés en offres de marché, dont 54 000 avec des fournisseurs alternatifs. Cela confirme la reprise des offres de marché auprès des fournisseurs alternatifs. Pendant la crise, le nombre de sites résidentiels en offres de marché avait augmenté ; cependant, les fournisseurs alternatifs avaient perdu des parts de marché, compensées par le gain de clients en offre de marché auprès des fournisseurs historiques. Au total, au 30 juin 2024, 14 millions de sites résidentiels sont en offres de marchés sur 34,0 millions. A noter que ce sont les offres de marché des fournisseurs historiques qui gagnent le plus de terrain ( 2 280 000 en 2022 contre  3 769 000 en 2024)

Tableaux de synthèse du trimestre écoulé publié par la CRE ( T4-2022 / T3-2023 / T3-2024)

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Pour les sites non résidentiels, la tendance est similaire. Au 30 juin 2024,  69% des sites non résidentiels sont en offres de marché, soit 3,65 millions de sites. Au 30 juin 2024, 1 677 000 sites non résidentiels étaient en offre de marché avec un fournisseur historique, tandis que 1 976 000 étaient avec un fournisseur alternatif. Au 30 septembre 2022, ces chiffres étaient respectivement de 1 824 000 et 1 877 000. On constate ainsi une tendance des sites non résidentiels à se tourner de plus en plus vers les fournisseurs alternatifs au détriment des fournisseurs historiques.

Augmented Energy qui accompagne fréquemment les nouveaux entrants dans l’obtention de leur autorisation de fourniture (lien vers l'article) ou en tant que responsable d’équilibre (lien vers l'article) a pu remarquer l’intérêt grandissant de divers acteurs à sauter le pas. Depuis début 2024, nous avons accompagné une dizaine d’acteurs de l’énergie à monter leurs dossiers pour devenir fournisseur.

Le nouveau fournisseur a-t-il un profil unique ?

Non, la nouvelle vague de fournisseurs regroupe des entreprises aux profils variés, avec des projets distincts. Contrairement à la vague de nouveaux fournisseurs des années 2016-2019, avec un business model axé sur la digitalisation et l'électricité verte bon marché, les nouveaux entrants de la période 2024-2027 semblent beaucoup plus hétéroclites. De là, une question se pose : qui sont-ils et pourquoi souhaitent-ils devenir fournisseurs ? 


 

          Nous optimisons votre consommation 

 

Tout d’abord, notons des projets portés par des start-ups technologiques, axées sur l'innovation, notamment dans la flexibilité du système électrique (modulation de la demande, batteries, V2G…) ou la performance énergétique. Ces entreprises souhaitent se lancer sur le marché de détail pour proposer de nouvelles offres aux consommateurs (B2B et B2C), leur permettant une meilleure maîtrise de leur consommation d’électricité.

 

Sur un axe assez proche certaines entreprises existantes déjà spécialisées dans l'efficacité énergétique veulent développer leurs activités en devenant fournisseurs. Leur objectif est de proposer à leurs clients déjà existants un service complet. 

Ces différentes entreprises ont un objectif relativement similaire : gagner de nouveaux clients grâce à une offre plus complète (fourniture d'électricité + services), tout en visant des marchés relativement de niche (clients flexibles, etc.). Les profils suivants ne s’intéressent pas forcément à l'acquisition de nouveaux clients, mais davantage à une meilleure gestion de leurs actifs et consommations.

           Qui veut de mes électrons renouvelables

 

On observe un engouement de la part des producteurs d'énergie renouvelable à devenir fournisseurs. Leur objectif principal n'est, encore une fois, pas le “marché de masse”, mais plutôt de créer des débouchés pour leurs parcs de production hors soutien.

Cet intérêt découle principalement des nouveaux contrats mis en place (cPPA) et de l’augmentation de l’autoconsommation. En effet, les producteurs peuvent être rapidement limités dans la valorisation de leurs actifs et/ou dans la mise en place d'offres intéressantes pour eux et leurs clients. En devenant fournisseurs, ces contraintes disparaissent. Mais de quoi parle-t-on exactement ?

Outre les obligations mises en place par la loi relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables, qui encourage les producteurs concluant des cPPA à obtenir une autorisation, les développeurs de petites capacités (solaire en autoconsommation, etc.), quelle que soit leur taille, vont pouvoir vendre plus facilement la production de leurs installations via des mini-PPA, voire mettre en place des communautés énergétiques.

 

Plus globalement, les producteurs semblent de plus en plus intéressés par “l’aval” afin de pouvoir mieux valoriser leur production renouvelable et expérimenter de nouveaux modèles d'affaires.

          Et si je devenais mon propre fournisseur ?

Enfin, les entreprises à forte consommation d’électricité s’intéressent de plus en plus à devenir fournisseurs. Leur but n'est pas de gagner des clients, mais de minimiser leurs factures d’électricité. En devenant fournisseurs, ces entreprises auront une meilleure gestion de leur consommation. Mais comment cela fonctionne-t-il ?


Devenir fournisseur présente trois avantages majeurs. D'abord, une optimisation plus efficace des achats d'énergie. En effet, pour chaque MWh que vous achetez ou vendez sur les marchés de l'électricité vous allez avoir plusieurs contreparties, cela vous permet d'avoir une diversité pour chaque transactions et donc d'optimiser vos achats d'énergie. De plus, vous avez accès à davantage de produits (options, etc). Ensuite, il est plus simple de “netter” plusieurs cPPA ou actifs de production directement, plutôt que de passer par un intermédiaire. En effet, votre production et votre consommation sont intégrés dans le même portefeuille.  Enfin, l’entreprise peut plus facilement mettre en place des stratégies de flexibilité énergétique. En effet, vous allez pouvoir exploiter de manière plus fine et moins couteuse votre flexibilité, en décalant votre consommation par exemple, sans avoir besoin de laisser une marge pour un intermédiaire.

Bien entendu, ce "profilage" des futurs fournisseurs n'est pas exhaustif. Des entreprises aux caractéristiques et stratégies différentes pourraient également envisager de devenir fournisseurs. Toutefois, on constate que les nouveaux entrants ne suivent plus le profil habituel des fournisseurs de 'marché de masse'. Ils ciblent désormais des marchés de niche ou cherchent simplement à optimiser la gestion de leurs portefeuilles d'actifs ou de consommation. L'objectif n'est plus d'attirer un maximum de clients. Ce qu'il faut surtout retenir, c'est la diversification des acteurs du marché, ainsi que celle des offres et des stratégies.

         Quels nouveaux défis les fournisseurs vont-ils devoir relever ?

Le marché est en plein bouleversement, et les fournisseurs, anciens ou nouveaux, devront être prêts à s’adapter à ces changements.

 

          Le Post-ARENH

L’un des principaux défis pour les fournisseurs sera la fin de l’ARENH à partir du 1er janvier 2026. Avec sa disparition, le marché de gros jouera un rôle prépondérant dans la construction des offres de fourniture d’électricité.

Pour rappel, l’ARENH a permis une meilleure concurrence sur les marchés de l’électricité grâce à l’entrée des fournisseurs alternatifs. Il proposait un prix fixe de 42 €/MWh pour un volume total de 100 TWh/an.

Le nouveau dispositif envisagé vise à consolider un marché de l’électricité à plus long terme, avec des prix plus stables, alignés sur la structure des coûts du mix énergétique français. Ce cadre inclura des contrats de marché sur des horizons de 4 à 5 ans, ainsi que des contrats 'PPA' nucléaires ou renouvelables. Enfin, pour les nouveaux fournisseurs qui apparaîtront courant 2025 ou 2026, l’ARENH ne fait déjà plus partie des critères de réussite pour entrer sur le marché. Ils se concentrent sur une couverture via le marché ou des PPAs, car le dernier guichet pour l'ARENH est prévu en novembre 2024.

          Le nouveau mécanisme de capacité.

Le fonctionnement du mécanisme de capacité date de 2017. En sept ans, de nombreux bouleversements ont eu lieu sur les marchés de l’électricité, et un re-design de ce mécanisme, afin de mieux répondre aux enjeux actuels, est nécessaire. De plus, la crise énergétique a mis en lumière certains dysfonctionnements ou erreurs du système qui doivent être corrigés.

Le mécanisme de capacité a été instauré pour assurer la sécurité d'approvisionnement du système électrique français, particulièrement durant les périodes de forte demande, comme en hiver. Chaque année, les fournisseurs doivent prouver leur capacité à couvrir la consommation de leurs clients lors des pics hivernaux, en acquérant un volume équivalent de garanties de capacité. Actuellement, une refonte du mécanisme de capacité est en cours (lien vers l'article), avec pour objectif de favoriser le développement des moyens de flexibilité.

           La mise en place d’une régulation prudentielle par la CRE (lien vers l'article)

La crise a mis en avant les comportements risqués de certains fournisseurs, en particulier en termes de cohérence entre l’approvisionnement à l’amont et leurs engagements à l’aval. La CRE a donc décidé de travailler sur différentes évolutions du fonctionnement du marché de l’électricité afin de suivre avec cohérence les offres des fournisseurs et la mise en place d’un contrôle prudentiel. Ces différents changements vont directement impacter les fournisseurs sur le choix de leurs stratégies de couverture. Outre l’impact sur le choix de la stratégie de couverture, le fournisseur va devoir faire face aux problèmes découlent d’un taux de couverture élevé, principalement  l’augmentation des garanties financières, qui ne sont pas toujours simples à mobiliser.  

 

          La volatilité des prix

 

Un des défis majeurs des fournisseurs sera la nécessité d’avoir des outils de prévision le plus précis possible ainsi que des moyens de production ou de consommation modulables rapidement afin d’éviter de payer le prix fort, c’est-à-dire, quand les prix atteignent des prix extrêmes. 

En effet, le marché à terme reste sous tension comme nous avons pu le remarquer au cours de cette année. Les prix court-terme sport et des écarts restent volatils oscillant entre pics de prix positif et négatifs. Le niveau de risque du marché reste actuellement plus élevé qu’avant la crise.

 

En conclusion, le marché de détail français commence à bouger après avoir été “gelé” quelques années par la crise. Les vagues de consolidation annoncées dans le marché de détail n’ont pas eu lieu. Ce qui n'empêche pas des acquisitions/fusion d’avoir lieu dans les années à venir.

Le nombre de fournisseurs en France devrait fortement augmenter sur 2025-2027, toutefois la plupart de ces fournisseurs ne proposeront pas des offres destinées au marché de masse et se focaliseront sur des niches spécifiques.   

SOURCE

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